Il était une fois un loup mal dans sa peau
Qui, dans sa garde robe, trouva un oripeau
Qu'il mettait à l'époque de son adolescence
Pour leurrer les troupeaux de moutons sans méfiance.
Revêtant la défroque il vit dans son miroir
Qu'il avait belle allure, (mis à part ses mâchoires
Qui s'étaient édentées, son regard avachi,
Son nez privé de flair sous ses trois poils blanchis)
"-Mais qu'importe ma vue et mon aspect chétif
Se dit-il en hurlant des bêlements craintifs…
Qu'importe si mes nippes me donnent l'air d'un con,
L'important est pour moi de paraître un mouton."
Sur cette réflexion il sort de sa tanière;
Ajuste sa guenille sur son maigre derrière
Et le voila parti, à petits pas de loup
Effrayer les moutons comme un grand loup-garou.
Ah! Qu'il était joli ce monstre cabotin,
Avec ses yeux piteux, sa trogne de coquin
Ses babines baveuses, son petit rire en coin,
Et sa truffe bourgeonnante au bout de son tarin!
Soudain il entendit de ses oreilles sourdes
Des bêlements confus qui racontaient des bourdes…
Comme un bon prédateur il se met à l'arrêt
En humant l'air ambiant un tantinet frisquet...
Et très vite il comprend que tous ces bêlements
Ne peuvent être émis par des moutons tremblants,
Mais plutôt, par une meute de brebis de passage
En train de papoter de chiffons et lainages.
Alors le pauvre loup, entendant ces discours
Se dit qu'il est de trop, et vite, fait demi-tour
Car il sait que sa laine risque d'intéresser
Ces brebis aux aguets des dernières nouveautés.
Mais hélas, la clique des brebis l'aperçoit,
Et toutes se précipitent sur sa fripe qu'elles croient
Etre la plus jolie des parures "dernier cri"
Qu'elles essayent, tour à tour, sur leur anatomie.
Et pendant ce temps là, notre loup se morfond
Dans son coin, apeuré par tout cet escadron
D'agnelles en folie qui, pour une petite laine,
A mit sa dignité fortement dans la peine.
Mais que pouvait-il faire face à ce beau destin
De se faire mettre à poil comme un pauvre crétin
En se laissant priver de laine sur le dos
Pour la donner à ceux qui en ont à gogo ?
Je dois dire qu'en écrivant ce texte ce matin, je ne savais pas du tout où j'allais. Je suis parti de cette image qui m'a fait marrer et comme je n'avais rien à faire de spécial, je me suis laissé délirer pour en arriver à cette moralité beaucoup trop utopique à mon goût…Mais l'important est de se faire plaisir en se racontant des histoires dont on ne connait pas encore la fin.